Visite de l’exposition Pionnières au musée du Luxembourg. Cette exposition rassemble 45 artistes femmes qui ont œuvré à Paris dans les années folles. Des artistes connues comme Tamara Lempicka ou Marie Laurencin côtoient des artistes oubliées comme Mela Muller ou Anton Prinner. L’on découvrira qu’elles ont conquis leur indépendance artistique aussi bien dans le domaine de la photo, du cinéma, de la peinture ou la sculpture.
Ce n’est qu’en 1897 que les femmes ont eu accès à l’école des Beaux-Arts. Mais elles n’ont pas attendu cette date pour pratiquer le dessin et la peinture. Le musée du Luxembourg avait déjà traité ce thème il y a deux ans avec l’exposition Femmes artistes 1780-1830 . De plus, Paris et en particulier le quartier Montparnasse, regorge d’académies privées qui accueillent les femmes. Ceci explique que de nombreuses artistes étrangères viennent rejoindre leurs homologues masculins pour former l’École de Paris.
En 1921, Bérénice Abott, photographe américaine, tente sa chance à Paris et apprend la sculpture dans l’atelier de Bourdelle. Mais c’est Man Ray qui lui propose de l’accompagner en photographie et très vite la jeune femme prend son envol. De son atelier de la rue du Bac, elle photographie le Tout Paris de Cocteau à la princesse Murat. L’exposition rappelle que la Grande Guerre a fait sortir les femmes de leur maison pour remplacer les hommes morts sur le front. Cela leur a aussi donné le goût de l’émancipation aussi bien dans leur choix de vie que celui de leur genre.
Tout d’abord, il est fondamentale pour elles de vivre de leur art. En 1925 Sonia Delaunay ouvre sa « boutique simultanée » et crée sa propre marque. En effet, elle présente des robes aux décors géométriques hauts en couleur qui sont le prolongement de sa peinture. Colorées aussi sont les oeuvres de Suzanne Valadon qui montre sa prédilection pour un fauvisme très personnel. L’exposition présente « la chambre bleu », où une nouvelle Vénus aux formes rondes est présentée la cigarette à la bouche.
L’émancipation de l’artiste passe aussi par l’émancipation de son corps. Joséphine Baker en est un vivement exemple. Chanteuse, danseuse et « Sirène des Tropiques », elle transforme l’identité de fille en celle de la femme moderne. Elle s’engage même sur un terrain plutôt dévolu aux hommes: la Résistance. D’autres femmes ouvrent des ateliers, des librairies ou des studios de photographie.
L’émancipation de l’artiste passe aussi par l’affirmation de sa sexualité quelle qu’elle soit. Tamara Lempicka deux fois mariée assume publiquement sa liaison avec Colette. Cela ne l’empêche pas de faire des portraits sublimes dans un style géométrique aux accents Art Déco. Anna Prinner, artiste hongroise arrive à Paris en 1928. Elle s’habille en homme, fume la pipe et s’appelle Anton. Au point que Picasso l’appelle « Madame Monsieur ».
Pour finir, l’exposition rappelle que ces artistes ont aussi été de grandes voyageuses. On les voit à Berlin ou à New-York pour peindre ou exposer. Le rôle de Peggy Guggenheim a dans ce cadre, été fondamental. A Paris, dans les années 25, Tarsila do Amaral rencontre Fernard Léger et Gleizes. Figure emblématique du modernisme, elle exportera son art au Brésil. Amrita Sher fille d’une hongroise mariée à un Sikh indien est admise aux Beaux Arts de Paris et se passionne pour l’art de Gauguin. Retournée en Inde elle peindra le monde rural dans des couleurs chatoyantes.
Véronique Proust
Visite de l’exposition Pionnières au musée du Luxembourg, visite guidée possible tous les jours sauf le dimanche du 2 mars au 10 Juillet 2022. Renseignements au 01 42 80 01 54