Les jardins chinois conférence. Du parc impérial au jardin du Lettré. Les jardins chinois sont avant tout des jardins privés qui reflètent la pensée de Confucius, Lao-Tseu et Bouddha. Ils sont avant tout méditatifs et reflètent le microcosme d’un monde philosophique que nous tenterons de découvrir à travers de nombreux exemples.
Les jardins chinois trouvent sans doute leur origine à l’époque Han (200 av-200 ap JC). On évoque alors des espaces clos où les hommes se divertissent et se délassent en compagnie d’animaux en semi-captivité. Puis cet espace clos va devenir une sorte d’univers dont l’élément principal est l’eau et la montagne. En effet, on considère cette dernière comme proche des dieux. Et l »on vite considérer ces deux éléments comme les secrets de l’immortalité. Pour que l’homme puisse se déplacer entre ces différents éléments, les paysagistes vont inventer la galerie. Cette dernière surplombe l’eau et peut être conçue comme une passerelle.
Par la suite, les éléments d’architecture se sophistiquent et comprennent pavillons, kiosque, pagode, hall, galerie, arche, pont, bateau, …). A ces trois éléments que sont l’eau, la montagne et le pont, on ajoutera l’élément végétal. Les fleurs, le pin, le thuya ou le bambou le constituent. Ils symbolisent la transmutation, le passage d’un temps à un autre. La fin de la période Han marque la période la plus productrice de ces premiers jardins clos. Par la suite, ces jardins trouvent une autre forme symbolique à la faveur des courants de pensée comme le Confucianisme, le Taoïsme ou le Bouddhisme .
Par exemple, le Confucianisme prône l’osmose entre l’homme et la nature afin qu’il puisse s’adapter intelligemment à toutes ses interactions. L’eau, la montagne et le pont demeurent toujours les éléments essentiels. C’est le cas du jardin de Xian réalisé sous les Tang au VIIe siècle. Par la suite, on supplante le jardin clos par le jardin érémitique ou le jardin du Lettré. Il s’agit de jardins réalisés par des Lettrés voulant se retirer du monde et aussi de la vie politique. L’organisation de l’espace de ces jardins permet à celui qui le contemple d’apprécier pleinement son rejet des contraintes sociales et sa quête de liberté. Le précurseur de ce type de Lettré est Tao Yuanming.
Très vite va se noter la différence entre le grand jardin « impérial » et politique et le jardin simple et retiré du Lettré. On connaît ces anciens jardins grâce aux admirables dessins de Wang Wei. Ce dernier se représente lui-même dans son jardin accompagné d’un joueur de luth. Huizhong, dernier empereur des Song du Nord (960-1127) était grand amateur de jardin. Il mit sur pied toute une administration chargée de collecter les rochers les plus spectaculaires de l’Empire pour agrémenter ses jardins.
La chute de la dynastie n’arrêta pas pour autant les grandes réalisations paysagères. Par exemple, fut agrémenté au cours des décennies du XIIe au XVIIIe siècle. Il s’agit d’un magnifique jardin que l’on ne saisit jamais en entier d’un seul coup d’œil.
Le jardin de la forêt du lion, qui le plus petit des 9 jardins de Suzhou, a été aménagé aux environs de l’an 1342, est surtout célèbre pour ses rocailles. Il annonce cet attrait pour la pierre qui va beaucoup se développer à l’époque Ming. Par ailleurs, les jardins privés vont se multiplient sous cette dynastie. Ils multiplient les points de vue que ce soit un point de vue sur des rhododendrons ou sur un lac romantique. Dans ce cadre, les bassins ont recours à une quantité de trouvailles issues de l’ingénierie. Mais il s’agit toujours de fournir au promeneur un lieu de méditation loin des turpitudes de la vie matérielle.
Au XVIe siècle, le jardin « Attardez-vous » est composé de 4 jardins dont la richesse vient de ses splendides roches mais aussi de ses kiosques et bâtiments éphémères. Celui de la « Politique des Simples » illustre le thème de l’eau avec des étangs et îlots de bambous. Celui de « l’Humble administrateur » renvoie aussi à une idée de pureté loin de la maladresse intellectuelle et de la tricherie. A la faveur de ces commandes privées, de véritables paysagistes vont faire carrière comme le maître Cheng.
Ce dernier a eu une formation de Lettré, a conçu de magnifiques jardins dans le sud de la Chine et écrivit même un traité de jardinage. Sous le règne de Qiang Long, le Jésuite Denis Attiret contribua à faire connaître ces merveilles au monde occidental. Il décrit la beauté des points de vue, le rôle de l’eau et le caractère exceptionnel des pierres dressées qui figurent la montagne céleste. Il décrit le rôle symbolique de l’orchidée, du bambou, du chrysanthème ou du lotus, du prunus. Et surtout, de la Montagne de l’Immortalité…