Visiter l’exposition Ribera au Petit Palais. Chef incontesté de la peinture napolitaine du XVIIe siècle, José de Ribera est un suiveur de Caravage . En effet, ses sujets sont souvent religieux et ses contrastes violents, comme son ainé. Mais Ribera a peint aussi des portraits émouvant d’infirmes et de vieillards d’une grande humanité. Sa carrière évoluant dans une Europe mouvementée est encore le sujet de nombreuses interrogations.

José de Ribera, dit el Spagnoletto a fait sa carrière à Naples mais il est espagnol. En effet, il naît en 1591, et fait sans doute son apprentissage dans l’atelier de Francesco Ribalta à Valence. A cette époque, la peinture européenne d’avant-garde marche dans les pas du Caravage et du Ténébrisme. En effet, les personnages évoluent dans un cadre resserré sur un fond sombre. L’éclairage violent souligne des visages ou des gestes de façon quasi théatrale.

Mais le milieu valencien ne lui suffit pas. Ribera veut voler de ses propres ailes. Il en a l’ambition mais aussi le talent.

Il part d’abord à Rome où il découvre Michel Ange et Caravage. En 1611 il est à Crémone, en 1613, à Rome. Là, il se familiarise aussi avec les œuvres de Carrache et Guido Reni. Son travail est abondant et magistral. Son Christ parmi les Docteurs du musée de Langres l’atteste. La mise en scène théâtrale accentuant le caractère dynamique va bien au-delà de la dimension caravagesque. lPar ailleurs, sa toile Le reniement de saint Pierre qu’il réalise à Rome en 1615 est dans la pure tradition du ténébrisme. Ce sujet, largement traité par les disciples de Caravage, reprend la composition de la Vocation de saint Matthieu du Caravage. Même cadrage, même éclairage et un sens inné de la narration théâtrale. C’est sans doute ce point que Ribera développera par la suite pour se détacher du maître.

Pour autant, ses œuvres de jeunesse qu’il réalise à Rome sont peu connues. On parle d’un certain « maître du Jugement de Salomon ». L’historien Gianni Papi (2002) attribue les œuvres de ce maître au jeune Ribera. Après 7 années romaines de labeur, Ribera apparaît comme le premier diffuseur du ténébrisme. Puis il acquière un succès considérable auprès des amateurs, satisfaisant leurs commandes. Pour autant, l’artiste a tant de dettes qu’il doit quitter Rome en 1616 pour  Naples. 

Malgré l’épidémie de peste qui ravagea la ville en 1656, Naples est une des foyers artistiques les plus brillants d’Europe. Sous l’impulsion du royaume d’Espagne qui détient la vice-royauté de Naples, de nombreuses églises voient le jour. Elles attendent leurs décorateurs et leurs peintres.

José de Ribera bénéficie de la protection du duc d’Osuna et devient célèbre. Son art ténébriste s’exacerbe au travers de ses œuvres successives. Ribera s’émancipe des critères caravagesques et crée son propre style plus dramatiques où les anatomies sont plus émaciées.. Pour se faire, il tire son inspiration en revisitant les maîtres vénitiens tels le Le Titien . Federico Zucarri y voyait même une version à peine modifiée de l’art de Giorgione . Enfin, à côté de nombreux complexes religieux, Ribera continue à peindre des tableaux de chevalet aux thèmes essentiellement religieux et en particulier des Martyrs.

Ces derniers ont des compositions dynamiques et opposent les figures de vieillards ascétiques et ridés à de jeunes anges à la peau diaphane et mystique.

Néanmoins, sa Femme à barbe et son Pied-bot annonce un genre nouveau où les imperfections de ce monde ont le droit à la bienveillance.

Puis, vers les années 1630, son art s’éclaircit à la faveur des peintres vénitiens qu’il regarde toujours avec beaucoup d’attention. Son œuvre continue de s’agrandir avec un nombre considérable de toiles religieuses. Elles sont le fruit des commandes des ordres religieux très présents à Naples. Malheureusement sa production diminue dans les années 1640 où le peintre atteint d’une maladie neurodégénérative ne peut plus peindre correctement. Cela l’oblige par exemple à diminuer les détails et de travailler en équipe.

A la fin de sa vie, il devient le maître de Luca Giordano. Il meurt en 1652 à l’âge de 51 ans.

L’exposition que présente le Petit Palais du 5 novembre au 23 Février 2025 permet d’éclairer la carrière du peintre dont certaines attributions ont longtemps été obscures. En effet, sa production romaine est aujourd’hui enrichie de près de 80 œuvres, depuis l’attribution à Ribera des toiles du « maître du Jugement de Salomon ». On y trouvera ses grandes compositions caravagesques comme le reniement de saint Pierre. Elles côtoieront les portraits individuels tels que Le mendiant en haillon, la Vieille usurière, l’enfant Pied-Bot. Les œuvres classiques telles que Apollon et Marsyas seront aussi présentées. A prêts exceptionnels, exposition remarquable.

Exposition visible tous les jours du mardi au samedi du 5 novembre 2024 au 23 Février 2025. Les réservations 2024 sont ouvertes, celles de 2025 ne vont pas tarder.