Marie Duplessis, la première des grandes courtisanes. Cette magnifique jeune femme séduisit le Tout Paris pour sa beauté et sa taille. Elle mourut de la tuberculose à 23 ans et inspira La Dame aux Camélias d’Alexandre Dumas.
Une quarantaine de créatures appartiennent à ce demi-monde de la Belle Epoque qui alimente les chroniques du monde. Il est vrai que soit par leur beauté soit par le scandale, elles cultivent leur image. Et elles n’ont rien à voir avec les quelques 6000 prostituées fichées par la Préfecture de police et les 80 000 lorettes en tout genre.
Elles ont pour nom la Belle Otero, Liane de Pougy, Cora Pearl, Emilienne d’Alençon, Valtesse de la Bigne ou Hortense Schneider…Les Lorettes sont des femmes de tête, car c’est elles qui décident. Par ailleurs, elles sont très cultivées et savent admirablement tenir une conversation. Ainsi, elles pourraient tout-à-fait faire figure de femme honnête. C’est le cas de Marie Plessis qui savait jouer du piano et tenir une conversation cultivées sur de nombreux sujets. Elle ajoutera Du à son patronyme comme Valtesse Delabigne séparera le « de » et le « la » pour s’appeler de la Bigne.
Les courtisanes font leur apparition après la Révolution mais c’est surtout sous Napoléon III qu’elles entrent en scène. En effet, les « fêtes impériales » données aux Tuileries donnent l’occasion aux aristocrates parvenus, de s’afficher au bras d’une « figure décorative » magnifiquement habillée. La France est alors un pays prospère en pleine expansion industrielle. L’argent coule à flots dans certains milieux financiers. La Fée Electricité illumine Paris qui voit se dresser la Tour Eiffel en 1889. Paris est aussi la capitale des plaisirs et les grands boulevards sont le rendez-vous du monde entier où les femmes jouent un rôle saillant.
Dans ce cadre la capitale se montre indulgente envers les grandes horizontales et leur commerce n’apparaît plus honteux. Les honnêtes bourgeoises vont même jusqu’à copier leurs magnifiques tenues et essayer leurs cosmétiques. Pour autant, les courtisanes n’ont pas toujours été riches loin s’en faut. Par exemple, Marie Duplessis était issue d’une famille de paysans normands. Livrée à elle-même à 16 ans dans la capitale, elle est d’abord chapelière et blanchisseuse avant d’être embauché par un riche marchand. Elle devient sa maîtresse et surtout en quelques mois, la courtisane la plus chère et la plus convoitée de Paris.
Alexandre Dumas-fils a pérennisé ses traits dans un roman La Dame aux Camélias. Il la décrit ainsi : “grande, très mince, noire de cheveux, rose et blanche de visage. Elle avait la tête petite, de longs yeux d’émail comme une japonaise, mais vifs et fins, les lèvres du rouge des cerises…Mais le grand écrivain se brûla les doigts. En effet, sa liaison avec la jeune courtisane ne dura qu’un an faute de moyens pour l’entretenir. Dans son appartement du 11 boulevard de la Madeleine, elle tient un salon littéraire au milieu de toiles et meubles du XVIIIe siècle. Balzac et Théophile Gautier le fréquente et Marie les reçoit dans des robes somptueuses qu’un de ses « protecteurs » le comte de Stackelberg lui offre.
Certaines courtisanes utilisent un stratagème différent : le mariage. Ainsi, Thérèse Lachman née dans la misère à Moscou se marie à un modeste tailleur qui ne satisfera pas ses ambitions. Aussi se rend-t’elle à Paris, fréquente les Grands Boulevards et l’opéra et rencontre un portugais, le marquis de la Païva. Elle lui propose d’éponger ses dettes de jeu en échange du mariage…et du nom. Mais ce dernier se suicide et Thérèse jette son dévolu sur Guido Von Donnesmarck. Il lui offre son nom et deux millions annuels de rente. Ainsi, elle se fera construire sur les champs Elysées l’hôtel de la Païva.
Marie Duplessis aurait bien épousé Agénor de Gramont, ministre de Napoléon III. Mais le père d’Agénor intervient pour éviter le scandale et la fuite du capitale familial. Alors elle épousa Edouard de Perregaux issu d’une famille de financiers qu’elle suivra à Londres. Mais le mariage l’ennuie et ne lui convient pas du tout. Et malgré sa tuberculose, elle revient à Paris brûler la chandelle par les deux bouts. Elle consulte des médecins mais aussi des charlatans qui n’arrangeront pas son cas. La tuberculose, le mal du siècle, n’a pas encore de traitement et emportera Marie à l’âge de 23 ans.
Elle mourut ruinée dans son appartement du boulevard de la Madeleine. Son corps sera jeté dans la fosse commune et son époux qui la fera enterrer dignement au cimetière Montmartre. Quelques temps plus tard, la vente de ses biens que l’on s’arracha connut un succès retentissent. Un an plus tard Alexandre Dumas faisait paraître La dame aux camélias qu’il écrivit en trois semaines. Marie est décrite sous les traits de Marguerite Gautier apparaissant toujours en public un camélia à la main. Et pourtant Marie n’aimait que les roses et les violettes.
Marie Duplessis, la première des grandes courtisanes
Véronique Proust