Napoléon et sa police. L’empereur en guerre et souvent hors de France tenait à être informé de ce qui se passait dans son empire. En cela, la police intérieure administrée par Fouché lui était d’un grand secours. Ces fameux “bulletins” et les réponses écrites de l’empereur nous renseignent aujourd’hui sur l’état de la France durant son gouvernance. Quant aux lettres dictées par Napoléon, elles nous dévoilent aussi sa manière de penser.
Après la Révolution française et ses débordements, il incombait à l’empereur de renforcer la police. Dans ce cadre il créa la préfecture de police et y mit à sa tête Joseph Fouché. Ce dernier était un homme de glace, implacable et très puissant. Napoléon l’admirait et le craignait en même temps car il savait ses amitiés jacobines et royalistes. De plus, Fouché se mêlait de tout et avait la main mise sur toutes les affaires de l’Etat. Aussi, à plusieurs reprises, Napoléon le disgracia menaçant de l’exiler ou le pendre. Bientôt, une rivalité s’installa entre les deux hommes.
Fouché possédait plusieurs police et des indicateurs dans tous les départements. Chaque jour des rapports affluaient sur son bureau. Le dénommé François était chargé de rédiger un véritable journal quotidien sur toute sorte de sujets. Ces derniers concernaient les troubles, les brigandages, la conscription, les rebellions ainsi que les réunions politiques ou privées. Fouché annotait ces feuillets réunis par un ruban rouge ou vert. Ils formaient le Bulletin, que Napoléon lisait avec grande attention. Et s’il tenait à ces informations car il était rarement sur le sol français, il lui arrivait aussi de se plaindre des nouvelles superflues et insignifiantes.
Très nombreuses sont les lettres écrites ou dictées par Napoléon. On les évalue à près de 35 000 et complètent admirablement les bulletins. Elles sont courtes et sobres et d’une grande clarté de style. Ses secrétaires le voyaient d’abord réfléchir, puis se lever, arpenter la pièce de long en large et dicter son courrier. Il commençait lentement puis s’échauffait, s’animait et les mots venaient d’eux-mêmes. A ce moment-là, ses dictées devenaient des monologues et il était bien difficile de saisir sa pensée sans l’interrompre.
Le secrétaire saisissait alors quelques mots en faisant des blancs qu’on s’efforçait ensuite de combler sans perdre le fil du discours. Voici pourquoi Napoléon employait très peu de secrétaires car rares étaient ceux capables de suivre ses dictées. Il fallait aussi être un homme de confiance devant qui Napoléon pouvait penser tout haut sans crainte d’indiscrétion. Ces lettres sont donc les réponses de l’empereur aux Bulletins. Il y indique son opinion sur les mesures prises, approuve, blâme ou rectifie. Elles révèlent également la précision avec laquelle l’empereur traite toute chose.