Le destin tragique de Gogol. Ce grand auteur russe est connu pour avoir écrit « les âmes mortes » et de nombreux autres ouvrages de contes et nouvelles d’une grande nouveauté. Mais après le succès de ce livre, il choisit d’en écrire la suite sans y parvenir. Persuadé d’avoir été guidé par le diable, il sombre dans de véritables délires mystiques et se laisse mourir en 1852.
Gogol naît en 1809 en Ukraine, où il passa son enfance dans le domaine de ses parents. Adoré par sa mère qui le cajolait constamment, il n’en demeurait pas moins de santé fragile. Il rêvait d’être comédien ou conteur et lorsqu’il termina ses études, il se rendit à Saint-Pétersbourg à la recherche d’un emploi. Il voulait surtout rencontrer Pouchkine. Ce qui fut fait en 1831 à Starkoï-Selo, et il fut ébloui par le grand poète.
Mais Gogol était craintif, maladif, avec une sensibilité à fleur de peau. Un simple rhume le poussait à écrire à sa mère qu’il était à l’agonie. On lui connaît peu d’ami. Par ailleurs, il n’osait approcher les femmes, mais il racontait souvent qu’on avait mis sur sa route une créature extraordinaire qui le défendait de toute tentation.
En 1831 il publie les Veillées du hameau récits burlesques inspirés de son Ukraine natale qui connut un succès éclatant tant le style était neuf. Mais au lieu de se réjouir de cette gloire soudaine, il prit peur. Mais il continua à écrire sans que ses lignes ne satisfassent son soucis de perfection. Pour autant Pouchkine aida son confrère, en lui donnant par exemple le sujet du Revizor. C’est dans ce cadre que Gogol va écrire les âmes mortes.
Dans l’empire russe, le mot âme désignait les serfs mâles. Et la fortune foncière des seigneurs se calculait au nombre d’âmes travaillant les terres. Le recensement se faisait tous les 5 ans mais il arrivait qu’entre temps des paysans meurent tout en continuant à « vivre » dans les registres de l’État. Cette absurdité administrative inspire au héros du roman de Gogol une escroquerie consistant à acheter ces âmes mortes à bas prix pour les « installer » dans un terrain acheté à bon compte. Puis il hypothéquait cette terre pour la valeur d’une terre florissante.
Alors que le thème frise l’absurdité, Gogol est persuadé qu’il écrit un roman gai. Mais l’analyse de la réaction des seigneurs lorsque le héros, Tchitchikov, propose de racheter les âmes ne fait pas rire du tout Pouchkine à la lecture des premiers chapitres du livre. Gogol en arriva à penser que son héros était le diable et que le diable n’avait rien d’exceptionnel. Il entreprit alors d’aller terminer son livre à Paris. Là, on pourrait penser qu’il voulait rencontrer les romantiques. Mais il n’en fut rien. IL cherchait dans ce quartier de la rue Vivienne à dépeindre la Russie et les russes tel un accusateur public. Aussi son livre se dessinait comme un triptyque désignant l’Enfer, le Purgatoire puis le Paradis.
Il se rendit ensuite à Rome. Mais la nouvelle de la mort de Pouchkine dans un duel le plongea dans un profond désespoir. Il termina son roman que le gouvernement de Moscou censura. En revanche, après de nombreuses négociations, il fut publié à Saint-Pétersbourg. Puis il décida d’écrire la suite des Âmes mortes qui devait être un hymne à la beauté. Mais il avait prit goût à la satyre et se voyait incapable de décrire la beauté ce qui le plongea dans un doute atroce.
Il voyait que ses dons ne servaient qu’à représenté le diable et non le divin. Alors il implore ses amis de lui dire ce qu’il trouve de mauvais en lui. Pletev lui avoue qu’il est sournois et égoïste. Gogol se met alors à jeûner et priser et la suite des Âmes mortes est si mauvais qu’il brûle le manuscrit.
Puis il écrit Extraits d’une correspondance qui frappent ses admirateurs tant le propos est pédant et bête. Là le Père Mathieu, moine fanatique, l’invoque de prier Dieu et se préparer au ciel. Il lui rappelle que chaque heure passée à lire est une heure volée à Dieu. Gogol dérive vers des délires mystiques et rêve de sauver les âmes des Russes. En 1852 ses délires se trouvent de plus en plus persistants. Il brûle à nouveau ses manuscrits et se laisse mourir
On s’est beaucoup interrogé sur la cause des délires mystiques de Gogol. Est-ce la phtisie, l’anémie, des troubles circulatoires. Une chose est sûr, c’est qu’il est l’un des écrivains majeurs de la Russie et qu’il a une influence majeures sur d’autres auteurs comme Dostoieswski.
Le destin tragique de Gogol
Véronique Proust